À quai, puis au mouillage, le mardi 29 octobre 1991

40º 25′ 26″ – 74º 01′ 34″ (données du Loran C)

Douches à 7 h 30 – sommes très matinaux, depuis le retour à l’heure normale. Avons peine à dormir le matin, même si en principe nous faisons relâche. Rencontre des Templeton, dans le terrain de stationnement. Leur prêtons la clef des douches, où ils n’ont pas accès, étant au mouillage. Allons déjeuner au petit casse-croûte du port. Un 3e matelot, Phil Daley, en attente au port depuis vendredi, se joint à nous. Il est très gentil et anxieux de repartir comme nous, évidemment. D’ailleurs nous savons qu’il y a deux autres voilier, canadiens, dont Neige d’été de Montréal, (entrevu brièvement à Castleton-on-the Hudson, lors de notre remâtage). Il y a également un Catamaran, Ru, ayant un jeune couple et une petite fille de 2 ans à son bord. En tout ça fait 6 voiliers, dont la destination est la Floride et plus loin sans doute, immobilisés dans le bassin. Des vents de 50-60 m/h et vagues de12′ pi. à 18 pi. sont encore au menu ce jour-ci. Inutile de dire que personne ne bouge. Et ça continuera ainsi mercredi et jeudi sans doute. Après le petit déjeuner, les Templeton viennent prendre le café à bord d’Arabesque. Ensuite nous sortons un peu sur la rue principale d’Atlantic Highlands, pour aller à la quincaillerie locale. Phil Daley nous accompagne.  Il offre de vérifier la « boîte à garniture » (stuffing box) qui semble être la cause de toute l’eau qui remplit la cale (1½ seau /jour). Après cet examen, il semble que là ne réside pas la cause. Il faudra chercher ailleurs. Pour le remercier, on lui offre la clef des douches. Puis il revient bavarder avec nous après le déjeuner. Il voyage en solo sur son voilier Pegassus 11. Je rappelle ensuite Raytheon, pour obtenir plus de renseignements sur le Loran. Je demande qu’on me les envoie par télécopieur, ici même, à la marina. Je place également une commande auprès de Boat U.S. Il s’agit de deux ceintures de sécurité, etc. Le tout devrait être livré ici, mercredi matin le 30. En attendant on décide de déménager le bateau, sur l’avis de Phil, qui trouve qu’on se fait encore drôlement secouer à quai au coût de 81 $ U.S. pour les deux nuits. Allons au mouillage près du batardeau et nous amarrons à une bouée d’amarrage. Phil m’enseigne à pour repérer et attraper l’estrope (amarre fixée à la bouée), la fixant ensuite au taquet à l’avant. Puis Paul le reconduit à son voilier, dans notre youyou, Petite Arabesque. Il utilise le moteur 4 forces. Ça va bien pour couper les vagues de la rade, mais avec 2 hommes à bord, le franc-bord du youyou donne à peine 10 cm.. Ce qui me fait dire au Capitaine à son retour, que je ne compte pas m’aventurer dans cette précaire embarcation, à moins d’être dans des eaux plus calmes ou à moins d’urgence… Mam’selle que j’avais emmenée marcher brièvement sur les quais avant notre départ de la marina, est très calme et se promène  un peu sur le pont, comme pour bien se rendre compte de notre nouvel emplacement. La radio 12 volts (stéréo), avec hauts parleurs bien disposés par Paul, lors de son installation lundi, nous tient en contact avec le monde de la musique classique (NPR, etc.). Tout est paisible dans notre univers, même si au dehors, l’ouragan continue à faire des siennes, avec des vagues qui passent outre au brise-lames, par plus de 1½m. Ça doit barder joliment en pleine mer ce soir…météo

Au mouillage, le mercredi 30 octobre 1991

Il a fait à peu près 35 ºF cette nuit, puisqu’il faisait 37 ºF à Central Park, selon les dires de la radio, mais sous notre enveloppe bien capitonnée, nous n’avons pas souffert du froid. Mam’selle est évidemment venue se pelotonner entre nous ou sur nous, selon son humeur. Paul s’habitue lentement à supporter cette présence féline dans notre nid, mais comprend qu’elle aussi recherche la chaleur durant la nuit.  Les pronostics de la  L’ouragan Grace,  le 30 octobre, dépeint comme la Perfect Storm  météo sont les mêmes  que ceux d’hier.

En mer, Vents de 65 nœuds et vagues de 39 pi. mais avec bourrasques encore plus fortes – donc un flot qui vient battre et se briser avec fracas et fortes traînées d’écume sur le brise-lames. La force de l’océan en furie, suite à l’ouragan, est incroyable et superbe à la fois, même si cala nous retient ici depuis dimanche. ..À quand le départ vers la chaleur? En écrivant après la vaisselle du petit déjeuner, j’écoute  une cassette, « Sea Scapes », qui elle, nous décrit une mer douce et enjôleuse – cela pourrait-il apaiser les flots ou l’ouragan  qui nous entourent aujourd’hui?

Vers 14 h, Paul invite Phil Daley pour un café. Phil s’est amarré dans notre coin depuis ce midi, car il dit que les autres postes d’ancrage plus près des berges sont pour des bateaux plus légers ou plus petits, le sien faisant  30 pi. comme le nôtre. Mais à son arrivée en pneumatique, Paul lui propose de se joindre à nous pour un sandwich au saumon avec tranches d’oignons. Donc on déjeune à trois, entamant une conversation très agréable, sur la Constitution canadienne. Puis Paul et Phil repartent chacun dans leur youyou. Paul ira en ville pour tenter encore de remplacer la lampe arrière du feu de circulation d’Arabesque; il ira également à la capitainerie chercher l’envoi de Boat U.S. et le Fax de Raytheon. À son retour, on constate en effet à quel point le manuel original du Loran était fautif. Paul se fait un plaisir d’y ajouter les 6-7 pages de corrections et d’addenda. La soirée se termine à écouter doucement la musique en stéréo. Il semble que le départ pourrait être prévu dans deux jours.

Au mouillage, le 31 octobre 1991

Toujours en attente. Je crois qu’on commence à prendre racine ici…Ça a bardé cette nuit! Des vents encore plus violents nous ont fait rouler et tanguer. Malgré tout on a réussi à dormir assez bien, mieux en tout cas que lors de notre première nuit à la marina. Je suppose que nous sommes en train de nous aguerrir pour devenir de vrais loups de mer. Et pour ce jour, on prédit encore des vagues de 12 pi.-20 pi. donc, des marées de 4 pi. -5 pi plus hautes que d’habitude, avec vents de 30-40 m/h, accompagnés de bourrasques du nord-est. Ceci devrait diminuer vers la fin de la journée. La côte du New Jersey a été très éprouvée par l’ouragan Grace, survenu très tard dans la saison, à ce qu’en dit l’agence de météo maritime. Il y a eu, par endroits, des vents de 62 m/h, même des inondations de propriétés sur la côte et de plusieurs routes qui ont dû être fermées. Des quantités de gens ont été évacués vers des Centres de la Croix-Rouge. Le Président Bush lui-même, a vu sa résidence d’été au Maine subir des dégâts considérables. On parle déjà de « tempête du siècle », ici mais il y a encore du temps avant la fin de celui-ci, sait-on jamais? Pendant ce temps, des hélicoptères militaires sillonnent le ciel de part et d’autre, sans doute  à la recherche des survivants, sur terre et sur mer, aux récents méfaits de l’ouragan… Invitons Phil et Gregg à partager un spaghetti maison à bord. Phil apporte la bière. On converse et c’est bien agréable cet échange autour de notre coin repas. Pour sa part, Phil avoue que c’est son meilleur repas de la semaine. Gregg est du même avis. Pauvres eux autres, ils ne doivent pas cuisiner souvent! Phil ajoute même, en boutade, « M’accompagneriez-vous vers le Sud, sur mon voilier? » On blague, puis on parle plus sérieusement de notre départ anticipé. Phil opte pour partir demain (vendredi). Paul et Gregg parlent de samedi. Donc, à moins d’autres changements à la Météo, Arabesque et Challenge (voilier de Gregg) feront route ensemble. Départ prévu : samedi, 10h. On se quitte après avoir vidé 2 théières bien chaudes et des pousse-café. Les gars qui doivent ramer pour rentrer chez eux, refusent tout autre alcool et avec raison.

adminArabesque - une odysséeArabesque
À quai, puis au mouillage, le mardi 29 octobre 1991 40º 25' 26' - 74º 01' 34' (données du Loran C) Douches à 7 h 30 – sommes très matinaux, depuis le retour à l’heure normale. Avons peine à dormir le matin, même si en principe nous faisons relâche. Rencontre des...