Cape Vincent, NY-  43º 51′ 59″    76º 1 ‘6″

carte

Région de Tibbets Point

7 h 40 Après l’audition d’Amazing Grace, départ par mer calme sous un ciel nuageux, vagues de 60 cm environ. Cap 206º Bientôt, la mer grossit : lames de 1,5 m et bourrasques qui vont du N.-E. au S.-E., accompagnées d’orages diluviens et d’une chute marquée du mercure.
11 h Norvic l nous appelle (VHF). Parti après nous, et grâce à la puissance de ses moteurs, il nous a rattrapés et même dépassés. On nous demande nos intentions quant à la traversée. Conciliabule du Capitaine et du 1er maître. On hésite entre rebrousser chemin et continuer vers Oswego. Optons finalement pour le second choix. On leur en fait part, puis promettons de maintenir le contact radio. Norvic l, pour sa part, a décidé d’aller se réfugier à Sacketts Harbor (NY). 13 h 30 La houle qui est maintenant de 2,5m à 3m nous fait tanguer et rouler tour à tour. Tout ce qui semblait sécurisé à bord, s’empile pêle-mêle au centre du carré. Les portes de garde-robes et d’armoires s’entrouvrent sous les assauts répétés du vent sur Arabesque. L’eau pénètre dans le « V » (cabine à l’avant), par l’écoutille mal calfeutrée du roof. Quant à nous, on en mène pas large. Je suis incapable de maintenir le cap, car la mer est trop forte. Au bout de 40 minutes, je demande au Capitaine de reprendre les commandes, malgré qu’il ait déjà passé plus de 5 heures au poste. Nous souffrons du froid, sommes trempés et je ressens de fortes nausées, mais je refuse d’y donner suite. Je me concentre sur la ligne d’horizon. Mams’elle a tellement peur, qu’elle disparaît pendant plusieurs heures derrière les monceaux de vêtements, livres, conserves, etc accumulés également sur le lit du capitaine.

15 h 45 Devant le peu de progrès accompli depuis notre départ et une allure de seulement 1,5 noeud à l’heure, décidons de suivre NORVIC vers Sackett’s Harbor, quitte à continuer demain vers Oswego.16 h 20 Depuis maintenant 25 minutes, nous nous dirigeons en direction E.-E.-S., les lames ont diminué à 1 m, lorsque nous subissons un brusque arrêt de moteur. Paul croît que le compteur du réservoir de Diesel est faussé, donc il s’agirait seulement d’un manque temporaire de carburant. Il remplit le réservoir à même  nos réserves, et essaie de remettre en marche- rien n’y fait. Et la mer qui continue à nous ballotter. Pas de moteur? Tant pis! Arabesque est un voilier, ne l’oublions pas. Hissons le foc et avançons maintenant à 2,5 noeuds/h. Passons près d’une crique inconnue vers 17 h 45. La nuit vient vite. Impossible de faire le point : les bouées qui devraient nous guider sont, ou absentes (ayant été retirées vu la saison tardive) ou obscurcies par des arbres que l’on devine difficilement sur les berges encore assez éloignées. Et c’est ainsi que, naviguant au hasard, (non, le Loran n’est pas encore fonctionnel), nous aboutissons dans une baie, que nous croyons être Henderson Bay, voisine de Sacketts Harbor. Appelons «  Bacchanale », (Nancy McCaskey & Rolf Norman, amis des Teron de Norvic), pour leur demander des précisions sur l’emplacement de Navy Point Marina (à Sacketts Harbor), où s’est réfugié Norvic pour la nuit. Bacchanale essaie de nous donner des points de repaire dans Henderson Bay et s’offre à venir nous y rejoindre. Hélas, ils ne nous y trouveraient point, et pour cause… nous sommes au fait à « Guffin Bay », mais l’ignorons toujours. Nous tournons en rond dans la baie, car les vents du nord-ouest nous refluent vers l’intérieur de cette anse. Pour l’instant, impossible de sortir de là à voile, afin de nous rendre à la marina désignée.

19 h 30 Paul jette l’ancre. La nuit est tout à fait tombée. Sommes à environ une trentaine de mètres de la berge où quelques veilleuses de chalets d’été barricadés sans doute, nous serviront de points de repère. Notre bonne (ancre) Danforth, elle, ne nous fait pas défaut et nous constatons avec plaisir que nous sommes bien mouillés, donc Arabesque ne chassera pas cette nuit. Vents de 30-40 noeuds, houle de 1,5m.On allume le Can-a-Flame, petite cheminée portative, fonctionnant au sterno. Quelle merveille ! Bientôt une douce chaleur règne dans le carré. Ensuite je réchauffe une bonne soupe aux pois Habitant sur notre réchaud à alcool. On voudrait aller au lit tout de suite, mais il faut d’abord récupérer les journaux, les livres, les cassettes etc. qui gisent partout. Il faut également placer notre «Berth Mate », dans de grands sacs à ordures. Le Berth Mate est un genre de sac de couchage de luxe, que j’ai fait sur mesures pour le « V», mais il est maintenant saturé de l’eau passée par l’écoutille. On refait le lit avec des draps et autres couvertures et oreillers, ces derniers ayant séché grâce à la chaleur du Can-a-Flame. Paul me prépare un Bloody Mary et s’attable devant une bière. La chatte ronronne sur un coussin à mes côtés. On se croirait presque à la maison, en hiver, devant un bon feu de cheminée. D’ailleurs, comme chez nous parfois, le vent hurle autour d’Arabesque…  « Never mind! To-morrow is another day ».

Enfin, du positif! Paul allume le petit fanal rouge à l’arrière et la petite lampe de secours à base rouge à l’avant. On s’assure ainsi d’éviter un abordage, sait-on jamais?? Quoique, cette crique semble vraiment déserte.

adminArabesque - une odyssée
Cape Vincent, NY-  43º 51' 59'    76º 1 '6' 7 h 40 Après l’audition d’Amazing Grace, départ par mer calme sous un ciel nuageux, vagues de 60 cm environ. Cap 206º Bientôt, la mer grossit : lames de 1,5 m et bourrasques qui vont du N.-E. au S.-E., accompagnées d’orages...